Cela faisait maintenant quelques jours que Jadina était en poste au bureau des Affaires Interne, aidant les fonctionnaires à organiser et préparer les documents. Elle travaillait sans relâche jour et nuit afin que la reconstruction se déroulait le mieux possible et sortir Ténébris de la capitale le plus rapidement possible. Tout le monde dans le département travaillait avec une synergie qui semblait presque contre nature, ce qui troublait la Légendaire. Pourquoi la-traitaient aussi bien? Les domestiques étaient très gentils et cordiaux avec elle. Cependant, les plus haut gradés fonctionnaires ne lui donnaient qu’un minimum de respect et seulement lorsqu’ils étaient obligés. Ils accomplissaient leurs tâches avec diligence et évitaient de parler avec Jadina le plus possible, mais parfois la Légendaire pouvait sentir leurs regards lourds qui dressaient les poils sur sa nuque. Leurs attitudes la troublèrent honnêtement. Alors qu’elle préparait ses documents en réfléchissant, Marilène entra dans le bureau. Quelques-uns des officiers s’arrêtèrent dans leur pas et accueillirent la dame d’honneur.

-Bonjour, Dame Marilène!, salua un des hauts officiers en faisait la révérence. Puis-je savoir l’honneur derrière votre visite? Son Altesse a-t-elle une demande à satisfaire?

Son regard plein d’avidité et d’ambition de grimper l’échelle du pouvoir en tentant de flatter l’entourage de sa maîtresse dégouta la dame d’honneur. Elle leva les lèvres avec répugnance.

-Son altesse souhaite les documents sur les matériaux de la reconstruction, répondit-elle avec un regard froid. L’officier rétrécit à sa franchise et jeta un coup d’œil inconsciemment à Jadina qui travaillait dans son coin. En voyant sa réaction à sa demande, Marilène vite compris qu’ils avaient probablement laissé tout le travail sur l’ex-princesse par mépris car ils ne pouvaient pas exprimer leur mécontentement de collaborer avec un héros en disgrâce dû au fait que la Légendaire était présente aux ordres de la princesse. Elle roula des yeux.

-Jadina!, l’appela soudainement l’officier avec dédain, réveillant la Légendaire de son hébétement. As-tu finie de compiler les documents sur les bons de commande?, lui demande-t-il irrité.

-Ha?! O-oui oui!, répondit Jadina en sursautant dans sa chaise. Ils sont ici...

-Mais qu’est-ce que c’est ça??, lui cria-t-il dessus soudainement en froissant les papiers sous ses doigts. N’oublie pas que ces documents sont pour son altesse! Ne nous embarrasse pas même si tu es nouvelle à-

-Je crois que ça suffit!, intercepta Marilène l’homme avant qu’il ne lançant les papiers vers la pauvre Légendaire qui tremblait de peur. Mais en constatant de plus près, la dame d’honneur put voir que la Légendaire semblait en fait très agacée, ce qui lui fit presque sourire. Je peux m’en occuper à partir d’ici... Légendaire Jadina, veuillez me suivre. Vous pouvez délivrer les documents en personne.

-Comme le souhaite Son Altesse, répondit Jadina en baissant la tête vers l’avant. Elle fit un petit sourire narquois à l’officier avant de ramasser les papiers en désordre, ce qui irrita ce dernier encore plus. Hélas, il ne put rien faire que regarder les deux filles sortirent du bureau avec hâte.

Elles traversèrent le long des couloirs illuminés du palais par les rayons de soleil par les fenêtres qui parsemaient le mur. Elles n’étaient pas vraiment pressées par le temps, mais Marilène pouvait voir que Jadina était excitée par la manière dont elle pressait les dossiers contre sa poitrine comme une petite fillette. La dame d’honneur soupira.

-Je vous dois des excuses pour leurs comportements, lui dit-elle avec un peu de remords. Malgré votre réputation par le passé, ils n’auront pas dû vous traiter ainsi, encore moins dans la place de travail!

-Hm? Oh non, ce n’est rien!, tenta Jadina de la rassurer en secouant sa main. Je m’y suis déjà habituée auparavant, avec l’accident jovénia et tout ça... en fait, je suis plutôt surprise qu’ils ne m’ont pas maltraité encore plus que ça...

-C’est parce qu’ils sont au courant que vous êtes là par les ordres de Son Altesse, répondit Marilène avec un sourire fier. Étant la seule héritière au trône de Larbos et voyant qu’elle n’a aucun rival, la noblesse préférerait ne pas être de son mauvais côté. Ceux qui t’ont jeté des remarques pensent qu’ils ont une chance de grimper plus haut, mais ne t’en inquiète pas. Ils seront traités en conséquence!

Jadina rigola un peu à ce qu’elle entendit, se sentant chanceuse d’être amie avec quelqu’un aussi puissant qu’Émilyne.

~~~

Autre temps, dans le chantier de construction...

Razzia était assis sur une des caisses disponibles alors que Toopie était penchée devant lui, travaillant sur quelque chose de métallique sur son côté droit.

-Tu es sûr qu’il n’y aura aucuns complications?, lui demanda Ténébris anxieusement en tapant du pied sur le sol impatiemment.

-Oui euh! Dois-je te rappeler qui a créé Ding-Dong?, lui répondit la Fabuleuse pour la énième fois en serrant un écrou avec une clé.

-Te t’inquiète pas Ténébriz, Toopie est une excellente bricoleuse. Ze peux attezter de zes compétenzes, tenta le colosse à rassurer son amant.

-Construire un robot est bien différent comparé à fabriquer une prothèse!, souligna Ténébris. As-tu déjà créé quelque chose comme ça auparavant??

-Héhéhé! Lorsque j’avais trois ans, j’avais fabriqué une prothèse mécanique pour un bébé lipan qui avait perdu une patte dû à des braconniers!, raconta Toopie avec un sourire satisfait. Son nom était Enzym et il était l’animal le plus mignon du monde! Je l’entraînais chaque jour lorsque moi et Michi-gan étions dans le cirque de Petrouchka, notre ancien employeur....

-Attend attend! Un cirque? Trois ans?!, s’exclama Ténébris bouche bée.

-Et oui! Que puis-je dire après tout, je suis un génie!, dit la Fabuleuse avec un air suffisant, irritant la fille de Darkhell un peu. Et voilà... tu peux te lever maintenant, dit Toopie à Razzia en lançant sa clé dans la boîte à outils. Elle se tassa de côté pour révéler un bras mécanique ornant son côté droit. Ce dernier se leva et étendit son nouveau bras métallique pour montrer deux cannettes jointes ensemble avec deux grands boulons qui tournaient pour faciliter les mouvements au coude et qui allait jusqu’à l’épaule couvert d’une épaulette. Sa main ressemblait à celui d’une armure de chevalier avec chaque doigt fait de trois morceaux de métaux faiblement attachés les uns aux autres pour imiter la fluidité des doigts en chair. La Fabuleuse instruit le colosse des mouvements rudimentaires pour tester le fonctionnement de la prothèse et il réussit à les accomplir sans le moins grincement de métal.

-Les tests de base sont un succès, conclut la Fabuleuse en montant ses lunettes. J’ai aussi ajouté une fonction d’extension dans ce bras, alors vas-y doucement... HÉ, MAIS ATTEND!

-RAZZIAAAAAA!?, s’écria Ténébris choquée en voyant un long câble déchaîner de son poignet en toute vitesse.

VRRRRRR!

Sa main métallique agrippa finalement sur la balustrade au deuxième étage et utilisant la force du ressort, Razzia bondit vers la destination de sa nouvelle main. Il atterrit impeccablement sous les yeux à la fois terrifiés et impressionnés de son amoureux.

-Fait attention! N’essaie pas de trop stresser les nouveaux liens, sinon ils risquent de se défaire!, le supplier Toopie d’en bas, mais le colosse ne lui jeta qu’un regard suffisant de derrière. Puis, avec une grande respiration, il relâcha sa main de nouveau et commença à traverser le long des rambardes en ce balançant avec sa prothèse au-dessus des filles abasourdies, ramassant des caisses vides tout au long du chemin. Elles étaient complétement absorbées par sa performance.

-Ça alors... espèce de fils de..., s’exclama l’inventrice en comprenant ce que le colosse faisait en jetant un coup d’œil à Ténébris, qui le regardait avec admiration.

Il ressemblait à une créature mythique planant dans les airs dans toute sa gloire... Après ce qui fut une éternité de sauter partout, le Légendaire atterrit brutalement au sol brutalement, envoyant une vague de poussière dans l’air. Ténébris retint son souffle alors qu’elle vit les boîtes que le Légendaire avait collecté s’écroulant vers lui à tout vitesse. Mais avant qu’elle ne pût dire quoique ce soit, Razzia rétracta son bras mécanique et le pointa vers les caisses pour les attraper en les empilant l’une sur l’autre.

-Z’est un zacré bras que tu m’as donné Toopie, s’exclama-t-il finalement en déposant la pile de caisses à terre en reprenant son souffle. La rousse lâcha un rire moqueur.

-Non mais, regardez-moi ce macho... tch!, protesta Toopie en lui donnant un coup au dos. Ne fais plus jamais ça, compris? Maintenant, montre-moi ton bras, je suis sûre que tu l’as endommagé quelque part...

-Mais non, ze t’azzure! Il marche à la perfeczion! De plus..., répondit Razzia en tournant son regard vers son amant, ... ze me zens comme un homme nouveau!

Voyant son sourire confident, Ténébris réalisa que son one-man show de tout à l’heure servait à restaurer sa confiance en lui. Elle se sentit embarrassée toute à coup pour tout le temps qu’elle lui avait grondé et se rendit compte qu’elle devait commencer à faire plus confiance à ces nouveaux camarades au lieu de se sentir coupable pour ce qui leur était arrivé sur l’île d’Erghyr. De plus, le voyant fléchir ses bras comme un champion de sport et de se chamailler de manière ludique avec Toopie la réchauffait le cœur. Toutefois, elle n’était pas toute à fait prête à se révéler complétement envers ses amis encore...

Razzia continuait à courber son bras mécanique comment un jouet alors qu’il vit Gryf transportant quelques planches sur ses épaules plus loin.

-Hé, Gryf! Vient voir quelle miracle Toopie a créé avec son esprit de génie!, l’invita le colosse toute excité, mais le jaguarian lui retourna un regard sombre, ce qui baissa l’atmosphère.

-Pas le temps, je dois délivrer ses planches là-bas!, répondit-il en retournant au travail en sueur, alors que les autres le regardèrent légèrement déconcerté par son attitude.

-Dur..., prononça finalement Toopie après un moment.

-Ouais..., répliqua Ténébris soucieusement en regardant Gryf s’éloignant d’eux.

~~~

-C’est parfait! Excellent travail comme toujours Jadina!, la complimenta Émilyne en feuilletant les documents budgétaires sur son bureau. La Légendaire sourit fière d’elle-même.

-Je suis juste contente de mettre mes talents au service de la couronne larbosienne, dit Jadina dignement.

-Plutôt pour apaiser ta culpabilité envers les dégâts que toi et tes compagnons aviez causé il y a un mois, mais j’accepte l’aide tout de même, commenta la princesse larbosienne sarcastiquement, ce qui fit étouffée Jadina sur sa salive.

-Kof! Kof!... Hem, en parlant de dégât, où en sont les réparations en ce moment?, demanda-t-elle penaude en tentant de changer le sujet

-Ah, très bien en fait! Quatre-vingts pour cent des constructions semblent être terminées selon ces chiffres, répondit Émilyne excitée en regardant les papiers devant elle. Je crois qu’on est prêt à rédiger le budget pour le Festival des Lumières!

-Génial! Quand est-ce qu’on commence? Je voudrais bien t’aider!, bondit immédiatement Jadina à l’opportunité.

-Toi, tu peux commencer en prenant une bonne nuit de repos, lui répondit Émilyne avec un sourire qui ne croyait pas en ses promesses de bonne foi. Marilène, peux-tu escorter notre invité vers ses quartiers maintenant? Il fait tard.

-Bien sûr maîtresse, l’obéit sa dame d’honneur.

Jadina regarda vers la fenêtre et vit le coucher du soleil qui peinturait le ciel orangé.

-Mais euh... !, tenta-t-elle de protester alors que la dame d’honneur la conduisit hors de la pièce.

-S’il vous plaît, suivez-moi Légendaire...

~~~

Jadina suivit Marilène alors qu’elles marchaient le long des couloirs du palais vers ses logements. L’atmosphère semblait un peu tendue si elle s’en basait sur Émilyne la jetant dehors si soudainement et ce silence insupportable.

-Haaa... il semble qu’on commence à accabler Émilyne avec notre ingérence dans les réparations, soupira Jadina avec un rire nerveux pour tenter de soulager l’ambiance un peu.

-Son Altesse n’est pas gênée pas votre présence... elle est plutôt reconnaissante de tout le travail que vous avez jusqu’à maintenant, répondit la dame d’honneur sèchement.

-Vraiment...?, demanda Jadina pas très convaincue par son ton sec.

-Oui. En fait, votre contribution dans le bureau des Affaires Internes a vraiment aidé à réduire la charge de travail de la princesse, insista Marilène toujours avec son ton aride.

-Alors, pourquoi m’as-t-elle chassé de son bureau?

La dame d’honneur sourit légèrement en baissant la tête.

-Parce qu’elle s’inquiète pour vous, répondit-elle avec une voix douce. Depuis votre arrivé ici, vous ne vous êtes que pousser à aider tous ceux autour de vous sans le moindre souci pour votre propre santé. Vous avez vaincu un dieu bon sang! Son Altesse veut seulement que vous puissiez vous reposer en paix.

-Ah vraiment...? Mais je crois qu’elle n’est que gentille avec nous puisque nous avons sauvé le monde et tout ça haha... rien de spécial vraiment...

-Je m’en doute fortement. J’ai servi la princesse pendant près d’une décennie et elle ne montre pas cette attitude envers qui que ce soit. Normalement, les gens de la haute classe récompensent des personnes avec des exploits avec richesse et gloire, mais étant donné son attitude récente envers vous, je dirais qu’elle vous chérit énormément, expliqua Marilène. Je dois admettre que voir ma maîtresse intime avec d’autres personnes est plutôt touchant après tout ce temps ... sauf le commandant Ikaël et le chevalier Danaël bien sûr, ils étaient déjà amis depuis bien longtemps!

-Ah? Je n’arrête pas d’entendre parler de leur amitié d’enfance, mais à quel point étaient-ils proches?, demanda Jadina curieusement.

-Voyons voir... leur connaissance remonte à bien avant que j’aie commencé à servir son Altesse, mais je sais qu’ils ont un lien profond ensemble depuis leurs enfances et qu’ils faisaient tous ensemble, réfléchit la dame d’honneur. Par exemple, ils participaient au Festival des Lumières à chaque année loyalement et durant les années quand le père du chevalier était absent en mission, la princesse escorterait le jeune Danaël personnellement à la fête! Malheureusement, ils se sont éloignés avec le temps dû à leurs responsabilités... C’est pourquoi ce festival signifie beaucoup pour elle, puisqu’il contient tous les souvenirs heureux de son enfance!

-Je vois..., répondit Jadina à petite voix en réalisant l’importance de ce festival pour Émilyne et pour les frangins. Elle se sentit un peu jalouse envers leur relation, même si elle savait qu’elle ne devait pas.

Elles continuaient à marcher jusqu’à ce qu’elles passèrent devant une grande fenêtre ouverte dévoilant le coucher du soleil qui illuminait tout le couloir d’un rayon lumineux. Soudainement, Marilène s’arrêta et se retourna brusquement vers Jadina, qui ne pouvait que rester muet devant la scène hypnotisant. Devant elle se tenait la dame d’honneur, qui était normalement strict et sérieuse, la regardant avec des yeux émus accentués par les rayons orange du soleil qui illuminaient tout son visage. Alors qu’une brise soufflait dans des mèches de cheveux non-retenus dans son chignon, Marilène s’inclina profondément devant Jadina.

-Même si je ne le montre pas vraiment, je tiens beaucoup à son Altesse. Alors s’il-vous-plaît..., dit-elle avec une voix reconnaissante, ...continuez à être une bonne amie à la princesse. C’est la seule chose que vous pouvez faire pour elle!